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Semaine de l'art contemporain : coup d'oeil sur Asia NOW



La foire Asia NOW fait son retour pour une 11e édition à la Monnaie de Paris. Son titre Grow
met l’accent sur le caractère cohésif de l’art et sa capacité à redéfinir nos manières de voir,
de penser et de nommer dans un monde toujours plus interconnecté. À visiter jusqu’à ce
dimanche 26 octobre.


La sélection s’inscrit dans une appréhension vaste de l’Asie, forgée à partir du concept de « communautés affectives » de Leela Gandhi, qui amène à dépasser l’arbitraire des frontières et à penser la relativité de la géographie. C’est pourquoi cette année, Asia NOW mise sur la dimension internationale en réunissant 22 pays parmi les 67 galeries exposantes. La foire réunit des artistes appartenant à des cultures et à des réalités socio-économiques diverses, mais liés malgré tout par les résonances intimes d’oeuvres qui relèvent du sensible. L’installation Under the Aegis of the Moon de Han Menguyn revient sur l’expérience du silence fertile vécue par l’artiste lors de sa résidence dans le désert d’AlUla (Arabie Saoudite).


Séquoia Scavullo remporte le prix Matsutani

Les finalistes du prix Matsutani — créé en 2017 par le Fonds SH?EN en l’honneur de l’artiste japonais — reflètent l’élasticité des confins asiatiques. Exposés à l’étage dans le Salon sur Cour, ils expérimentent la matière de façons très variées. Natsuko Uchino superpose une pluralité de matériaux bruts évoquant la stratification des sols, dans des oeuvres palimpsestes dont le format s’apparente à celui de la toile académique. La lauréate 2025, Séquoia Scavullo, travaille la superposition en diluant les formes dans la matière. S’inspirant de la culture Taino dont elle est issue, elle utilise le thème de l’eau pour signifier la fluidité entre le corps et l’esprit, la réalité et le rêve, l’humain et le non-humain, qui coexistent avec harmonie dans ses toiles.


Notre parcours en quelques étapes clés

Les jumelles coréennes Park Chae Dalle et Park Chae Biole reconstituent leur maison d’enfance dans le stand de la Galerie Anne-Laure Buffard, rendant hommage au lieu où elles ont découvert l’art. Dans cette bulle enveloppante du souvenir, faite de textile et de peinture, les céramiques de Yoshimi Futamura sèment le trouble. Faisant référence à la catastrophe de Fukushima en 2011, elles nous extraient de la rêverie et de l’insouciance en rappelant la fragilité de nos repères.

La galerie Sabrina Amrani réunit une intéressante sélection d’artistes. Le duo stambouliotes :mentalKLINIK joue avec la perception et l’attrait, brouillant les limites entre le vrai et le faux. Leur Wetpainting — résine transparente et verre trempé — affirme son ambiguïté en montrant des traces picturales et frustre le narcissisme du spectateur qui y devine son propre reflet. Les installations minimales in situ de Jong Oh explorent la ténuité de la limite entre la présence et l’absence, utilisant le fil et son ombre comme matériaux équivalents.

La nouveauté de cette édition : le Third Space

Cette année, Asia NOW inaugure un nouvel espace d’exposition où la séparation entre les galeries est rendue moins évidente, afin de faciliter le dialogue entre les oeuvres et nourrir une réflexion collective.

Sahil Arora, fondateur de la Galerie Method (Mumbai), y présente l’exposition « We were always neighbours », rassemblant des artistes originaires d’Inde et du Pakistan dans une tentative de faire émerger l’unité perdue d’un peuple par-delà les conflits actuels. L’oeuvre de l’artiste pakistanaise Fatima Kaleem, diptyque relié par des mèches de cheveux cousues sur la toile, fait face à celles de Gargi Chandola. Leurs travaux respectifs articulent une expérience personnelle de la féminité à une réflexion plus large sur le rôle occupé par les femmes dans les récits et l’histoire. Elles utilisent des procédés narratifs de façon très distinctes : Gargi Chandola adopte un un style qui rappelle les miniatures indo-persanes et Fatima Kaleem s’exprime dans un langage contemporain qui emprunte aux vocabulaires surréaliste et symboliste.

La Galerie Vazieux investit une grande partie du Third Space avec les oeuvres de l’artiste coréen Moonassi. Ses toiles isolent des moments éphémères, des contacts, dont la profondeur se révèle à travers la dialectique du noir et du blanc, qui donne à chaque oeuvre un équilibre propre. Le travail des reflets et la texture brumeuse véhiculent une douceur tangible. Les visages semblent évoquer les sculptures des Cyclades, inscrivant ces scènes dans une temporalité vertigineuse partant des origines.

Wanbing Huang (Galerie Looloolook) expose trois installations récentes en écho au thème de cette édition d’Asia NOW. Ses Trois symboles — vagues, tourbillon et chaos — correspondent à la résonance, la transformation et l’origine. Huang revient ainsi aux fondamentaux de la philosophie orientale en donnant forme à des concepts communs à plusieurs cultures et capables de retentir en chaque individu.

Tous les jours, des performances, projections, ateliers et conférences se succèdent au cours de la journée. Des visites guidées sont organisées par les différents commissaires d’exposition ce mercredi 22 octobre.

La foire accueille le public de 11h à 21h ce mercredi 22 octobre, puis de 11h à 20h jusqu’au dimanche 26 octobre.

Emma Boutier


Légende image : Vues du stand de Galerie Anne-Laure Buffard à Asia Now © Wonwoo Kim