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Miss Recuerdo - Tohé et Grichka Commaret

Miss Recuerdo - Tohé et Grichka Commaret : Tohé Commaret, 8, 2022, vidéo et Pukyu, 2025, vidéo. Vues de l’exposition « Miss Recuerdo » à la Fondation Pernod Ricard, Paris, 2025. Photo Aurélien Mole.   


L'exposition


Réalisée en collaboration avec le groupe de designeuses CluelesS à la Fondation Pernod Ricard, sous le commissariat d’Elsa Vettier, l’exposition intitulée Miss Recuerdo (oxymore mêlant anglais « miss » pour « oublier » et espagnol « recuerdo » pour « souvenir », « mémoire »), est la symbiose parfaite entre les œuvres de Grichka et Tohé Commaret, artistes frère et sœur, peintre et réalisatrice. Attachés au quartier de leur enfance à Vitry-sur-Seine, ils y ont chacun développé leur langage propre. Cet espace est devenu un terrain d’expérimentations en toile de fond de leurs créations. Diplômée des Beaux-Arts de Paris, Tohé a reçu plusieurs prix dans des festivals internationaux pour ses œuvres explorant les imaginaires sensibles de ses protagonistes. Quant à son frère Grichka, il expose à de nombreuses occasions en France, en Allemagne et en Suisse ses peintures parsemées de « références « communes » »[1]. Ici, elles évoquent des maquettes abstraites des rues de son enfance.

Dans cette composition d’ensemble, visuelle et sonore, les récits se confondent et se répondent, dépeignant les fragments de mémoire des personnages mis en scène. Ces bribes de souvenirs rythment les courts-métrages exposés, à l’instar de 8[2] et Pukyu[3]. Ces films réalisés sans script, invitent les acteurs et actrices à créer eux-mêmes l’étoffe et la profondeur de ceux qu’ils incarnent. Les personnages sont plongés dans un état de dissonance cognitive, entre « réalité courante » et « réalité désirée ». L’obsession de fuir la pénibilité de l’existence devient irrépressible. En témoignent les extraits du film coécrit par les artistes, Palma[4], qui introduit Paloma, la protagoniste, avant sa disparition. Dans l’arrière-boutique où travaille son amie, elle est interpellée par une interview à la radio : un chirurgien explique qu’il aurait inventé un procédé révolutionnaire pour changer la destinée de ses patients en redessinant les lignes de leurs mains. Y aurait-elle cédé ?

Les tableaux de Grichka entrent en résonnance avec ces photogrammes. En vaporisant la peinture sur des pochoirs réalisés préalablement à l’ordinateur, il crée ainsi les décors dans lesquels se jouent les événements. Simulacres de cages d’ascenseur, de bouches d’aération, de lampadaires à la lumière faiblarde, ses peintures tissent les éléments du paysage urbain, souvent sous forme de réseaux vus du ciel. Il déploie ainsi une vision macroscopique de cet environnement qu’il refaçonne à partir de ses souvenirs. Un œil, une bouche, une oreille ponctuent parfois ces vues aériennes : ils dissimulent les échos muets des êtres qui vivent là, imprégnés dans les structures brutalistes de la ville.


Marie Tuffou

[1]Dossier de presse, portrait de Grichka Commaret, exposition Miss Recuerdo, Fondation Pernod Ricard, 2025
[2]Tohé Commaret, 8, 2022, vidéo, 20’. Courtesy de l’artiste
[3]Tohé Commaret, Pukyu, 2025, vidéo, 10’. Courtesy de l’artiste et Les Volcans
[4]Grichka Commaret et Tohé Commaret, Palma (Extrait), 2025, vidéo, 9’. Courtesy des artistes et Anna Lena Films

Quand


18/02/2025 - 19/04/2025

Les artistes