Née en 1976, l’Israélienne Maya Zack s’attache aux fragments manquants de l’histoire des juifs en Europe. Si la Shoah apparaît toujours en arrière-plan dans ses travaux, c’est l’entreprise de disparation de cette histoire même qu’elle cherche à conjurer. Conjuguant dessin, sculpture et travail de la caméra, ses films investissent donc autant la mémoire que le travail de recherche pour l’activer. Au musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, trois de ses courts-métrages sont réunis. Le plus ancien, Mother Economy (2007), voit les activités domestiques d’une femme s’affairant à tenir son foyer se doubler d’une entreprise de rationalisation de l’ensemble de ses gestes, évoquant ceux d’une scientifique. Comme si, alors que le bourdonnement d’une radio laisse parvenir l’indice du climat destructeur de la Seconde Guerre mondiale, un travail d’archivage était déjà en cours, se logeant dans les gestes et les objets du quotidien. Dans un même décor des années 1930, Black and White Rules (2011) fait lui aussi intervenir le rôle d’une scientifique, tentant de rendre compte d’une expérience de dressage de chiens, déviant subitement en un épisode de violence. Métaphore de l’histoire européenne, cette mise en scène de la crise du modernisme dont le pouvoir de maîtrise n’est plus que celui de dresser un constat trouve une autre voie avec Counterlight (2016-2017). Mettant en abyme son travail de montage, Maya Zack y montre sa tentative de se glisser dans une photographie de Paul Celan, témoin direct de l’Holocauste, à Czernowitz, la ville natale du poète roumain passée aujourd’hui en Ukraine. Là encore, il s’agit bien de résoudre l’équation entre archive et mémoire.

Extrait de l'article de Tom Laurent publié dans le N°96 de la revue Art Absolument.

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