Si l’œuvre de Dürer est fameuse pour sa dimension européenne, cette exposition raconte l’intérêt durable des Suisses pour ce maître de la gravure, à travers les collections du pays, qui fut l’un des lieux importants de sa création. La réunion de trois d’entre elles – la Fondation William Cuendet, le Fonds des estampes du professeur Decker et l’Association du musée Alexis Forel – dans un lieu consacré à l’estampe, le Cabinet cantonal, permet d’en apprécier la singularité. Le pasteur Cuendet se passionne pour les sujets religieux, le professeur Decker dirige sa collection dans une lignée historico-esthétique, au détriment de la rareté, tout en soulignant la maestria de l’artiste. Quant à Forel, il utilise ses épreuves comme références pour sa propre pratique. Évocation de ses voyages de jeunesse, le Wanderjahr (1490-1494) retient l’artiste à Bâle – ville de l’imprimerie et centre de la culture –, pour rencontrer le frère du peintre et graveur Martin Schongauer. Dürer participe à la production de livres illustrés et dessine pour des éditions bâloises. En 1519, après la mort de Maximilien Ier (qui avait ordonné à la ville de Nuremberg de verser une pension annuelle à Dürer), c’est à Zurich que l’artiste accompagne ses amis en mission diplomatique. Enfin, l’exposition inscrit Dürer dans notre temps avec sa postérité suisse, visible par la présence d’œuvres contemporaines inspirées de son travail, notamment de La Mélancolie, source de création inépuisable de par son caractère énigmatique.


Déborah Gutmann

Site de l'exposition