Grayson Perry. Vanité, identité, sexualité
L'exposition
Dans un contexte de recrudescence des agressions homophobes et transphobes – avec une augmentation des 15 % de plaintes enregistrées par le ministère de l’Intérieur sur les neuf premiers mois de 2018 –, cette première grande monographie de Grayson Perry en France sonne comme un appel au droit à la différence, bien que son œuvre s’attache plus à mêler des polarités identifiées qu’à faire émerger une esthétique alternative.
Parce qu’il est issu d’un milieu ouvrier et a vécu dans un squat à Camden Town tout en menant une carrière d’artiste et d’animateur télévision, Grayson Perry fait foi d’une identité multiple. Parce qu’il s’est attelé dès les années 1980 à la céramique – alors largement renvoyée à un art « mineur » –, cet Anglais s’est vite départi des oppositions entre culture populaire et iconographie classique, jusqu’à travailler lui-même le métal, à s’adonner à la gravure et à produire de grandes tapisseries pop gothiques, voire à customiser une moto pour en faire un autel roulant. Enfin, parce qu’il est à la fois un homme et une femme – Claire est le prénom de son alter ego féminin –, l’artiste dépasse cette vision communément admise d’un animal social normé, dont les fétiches seraient irrémédiablement attachés à son sexe. De fait, c’est avant tout cette dichotomie féminin/masculin, et donc la définition de ce qu’est être un homme ou une femme, que Perry interroge. « Être un travesti ne signifie pas faire semblant d’être une femme », commente-t-il, « il s’agit de porter les vêtements faisant naître en moi exactement les sentiments que je veux éprouver ». Exposées à la Monnaie, les robes qu’il porte lorsqu’il se met en scène exhibent leurs couleurs chatoyantes – et bien malin celui qui prétendra déterminer le genre de la candeur amusée qu’elles suscitent. De même, il n’hésite pas à juxtaposer avec l’ironie nécessaire visage de femme et attributs sexuels masculins dans une céramique comme Women of Ideas. À l’heure où les débats se multiplient autour des violences faites aux femmes, l’art de ce traqueur de fétiches en toutes choses élargit leur spectre à celle – corollaire – d’un homme auquel vulnérabilité, erreur et intuition sont proscrits par le virilisme ambiant. En toute logique, fondant séduction et dénonciation, ses diktats – la capacité naturelle de l’homme à user de la machine ou son penchant pour la bière – ornent la surface émaillée de Shadow Boxing. L’exposition se clôt sur la vision d’un crâne en bronze, Tête de géant vaincu, ciselé de stéréotypes du même acabit pour mieux en étriller la vanité.
Emma Noyant
Parce qu’il est issu d’un milieu ouvrier et a vécu dans un squat à Camden Town tout en menant une carrière d’artiste et d’animateur télévision, Grayson Perry fait foi d’une identité multiple. Parce qu’il s’est attelé dès les années 1980 à la céramique – alors largement renvoyée à un art « mineur » –, cet Anglais s’est vite départi des oppositions entre culture populaire et iconographie classique, jusqu’à travailler lui-même le métal, à s’adonner à la gravure et à produire de grandes tapisseries pop gothiques, voire à customiser une moto pour en faire un autel roulant. Enfin, parce qu’il est à la fois un homme et une femme – Claire est le prénom de son alter ego féminin –, l’artiste dépasse cette vision communément admise d’un animal social normé, dont les fétiches seraient irrémédiablement attachés à son sexe. De fait, c’est avant tout cette dichotomie féminin/masculin, et donc la définition de ce qu’est être un homme ou une femme, que Perry interroge. « Être un travesti ne signifie pas faire semblant d’être une femme », commente-t-il, « il s’agit de porter les vêtements faisant naître en moi exactement les sentiments que je veux éprouver ». Exposées à la Monnaie, les robes qu’il porte lorsqu’il se met en scène exhibent leurs couleurs chatoyantes – et bien malin celui qui prétendra déterminer le genre de la candeur amusée qu’elles suscitent. De même, il n’hésite pas à juxtaposer avec l’ironie nécessaire visage de femme et attributs sexuels masculins dans une céramique comme Women of Ideas. À l’heure où les débats se multiplient autour des violences faites aux femmes, l’art de ce traqueur de fétiches en toutes choses élargit leur spectre à celle – corollaire – d’un homme auquel vulnérabilité, erreur et intuition sont proscrits par le virilisme ambiant. En toute logique, fondant séduction et dénonciation, ses diktats – la capacité naturelle de l’homme à user de la machine ou son penchant pour la bière – ornent la surface émaillée de Shadow Boxing. L’exposition se clôt sur la vision d’un crâne en bronze, Tête de géant vaincu, ciselé de stéréotypes du même acabit pour mieux en étriller la vanité.
Emma Noyant
Quand
19/10/2018 - 03/02/2019